l’Appellation Pouilly-Fuissé
L’Appellation est une entité à part entière et se doit d’être en synergie avec les domaines c’est pourquoi les actions des 2 sont à mettre en corrélation au maximum afin d’assurer une pertinence et une performance optimales.
Les points qui vont suivre sont principalement destinés au marché des particuliers pour renforcer et installer une image de qualité auprès des consommateurs novices et amateurs qui sont beaucoup moins au fait des actualités du monde du vin, contrairement aux amateurs éclairés et aux connaisseurs qui ne sont pas les cibles à convaincre.
Développement de L’APPELLATION POUILLY-FUISSÉ
3 points clés sont à prendre en compte :
1 – L’anticipation !
L’anticipation est essentielle en considérant le fonctionnement de l’Appellation et la conception de ses vins. En effet, la planification des ventes se fait en amont, avec une vente en elle-même qui se fait plusieurs années après les vendanges, car il se pratique des élevages plutôt longs.
Élaborer la stratégie de mise sur le marché en avance est primordial, car le vin se doit d’être le reflet d’un besoin qui existera au moment de sa mise sur le marché et non au moment de la vendange. C’est un exemple typique que nous retrouvons en Champagne avec des assemblages qui se font une à plusieurs années avant la vente, ce qui crée la difficulté d’évaluer les tendances futures du marché.
2 – La perception de la marque
La perception de la marque est constituée de 2 éléments, l’un extérieur (perception clients et partenaires) et l’autre est la résultante des leviers internes à l’Appellation qui affecte directement la perception extérieure. L’objectif est de faire coïncider la perception de la qualité et le prix haut de gamme (NB : un prix supérieur à 10 € est déjà dans le haut de gamme aux yeux des consommateurs). Il y a un décalage très perceptible au quotidien à l’Atrium (boutique de l’Appellation) entre la perception du Pouilly-Fuissé et son prix. Le ressenti visuel de la boutique et la perception actuelle des vins du Mâconnais entraînent pour les consommateurs novices et amateurs une valorisation qui n’est pas le reflet exact de la grande qualité des vins de la région, mais bien en dessous de la réalité. Cela suscite un étonnement à la vue des prix affichés pour des Pouilly-Fuissé. C’est d’autant plus marquant avec les 1ᵉʳˢ Crus qui sont l’incarnation de la montée en gamme du Pouilly-Fuissé.
L’arrivée de ces 1ᵉʳˢ Crus peut être vue comme un lancement de produit et pourrait être accompagné comme tel afin de cadrer au plus proche des attentes la perception de la qualité des vins qui sera déterminante pour la valorisation future sur le long terme.
Pouilly-Fuissé étant jusqu’à présent un peu à l’écart du reste des Vins de Bourgogne aux yeux du grand public, il n’y a pas encore de perception réellement équivalente aux 1ᵉʳˢ Crus de la Côte de Beaune ou du chablisien et le marché des particuliers ne met pas encore sur un pied d’égalité les deux types de 1ᵉʳ Crus bien qu’ils répondent à des critères très similaires.
Une des réflexions récurrentes est en substance « c’est cher pour du Pouilly-Fuissé, si je veux des vins de qualité, avec la mention 1ᵉʳ Cru, autant aller en Bourgogne pour le même prix ». Cela reflète un manque d’association du Pouilly-Fuissé avec les autres vins de Bourgogne par les non-connaisseurs et constitue un véritable frein pour justifier les prix en augmentation qui ne correspondent plus à l’idée du vin que se font les consommateurs. Également, l’habitude de Pouilly-Fuissé de fournir des vins de très haute qualité, très accessibles en termes de prix, constitue un véritable choc pour les habitués qui se retrouvent sans justifications pour expliquer les changements qu’ils perçoivent comme brutaux, car cela n’a pas été préparé dans la durée pour rendre le changement moins difficile.
L’Appellation est un levier central pour appuyer les démarches individuelles propres à chaque domaine. L’ODG n’ayant pas cet aspect commercial à l’opportunité de véhiculer des messages clés qui ne seront pas perçus avec un a priori marketing ou commercial par le consommateur. C’est l’opportunité d’avoir un impact plus large qu’à l’échelle d’une propriété en travaillant le taux d’engagement de la communauté du Pouilly-Fuissé et en investissant du temps dans le développement d’ambassadeurs de la marque (consommateurs pleinement convaincus par l’Appellation et qui feront d’eux-mêmes une publicité positive basée sur leur expérience auprès de leur entourage) et permettront d’avoir un bon retour sur investissement, car les ambassadeurs ont un très fort taux de transformation étant donné qu’ils s’adressent à leur entourage qui est bien entendu pleinement convaincu de la qualité et de l’irréprochabilité du témoignage.
C’est également un levier à développer auprès d’autres professionnels du vin pour appuyer la crédibilité des producteurs dans leurs démarches de promotion et de vente. Il est important de proposer un réseau de qualité aux vignerons pour pérenniser les ventes et les partenariats avec une valorisation reflétant une image intéressante pour tous et potentiellement un ré-échelonnage des gammes avec une différence plus marquée et explicite entre les Pouilly-Fuissé « village » et les 1ᵉʳˢ Crus.
3 – Les limites
Le budget est l’un des principaux freins à la mise en place d’un développement structuré et planifié des domaines et des appellations. L’ultra-spécialisation en gestion d’exploitation, en viti-viniculture et disciplines œnologiques des vignerons ne permet pas d’avoir une vision marketing et commerciale pleinement aboutie soit par manque de compétences internes à la structure et/ou par manque de temps.
La force des habitudes est également un des grands freins. Ainsi, l’évaluation des besoins à l’échelle des domaines est biaisée par un écoulement de stocks convenable, voire total qui rassure, mais ne signifie pas pour autant qu’il n’y a plus de marge de progression, notamment pour anticiper et se prémunir contre des aléas climatiques ou économiques.
En conclusion, l’objectif final n’est pas seulement de tout vendre. En effet, il n’y a pas réellement de soucis pour écouler les stocks, mais surtout de mieux vendre afin de ne pas tomber dans les mêmes problématiques que le Beaujolais qui peine à se renouveler et à convaincre malgré de réels progrès sur la dernière décennie.
L’Appellation est le meilleur atout des vignerons pour parvenir à valoriser le Pouilly-Fuissé mais peut aussi être une vraie faiblesse. C’est, en effet, l’Appellation qui est centrale pour donner le ton à l’ensemble des vignerons qu’elle représente et qui a le moyen de sensibiliser ces derniers à certaines problématiques. L’ODG est moteur et doit accompagner les vignerons comme cela se fait dans le Beaujolais pour redorer l’image des crus ou en Champagne pour faire évoluer l’image prestige et réintégrer le Champagne en tant que vin à part entière. On le constate également dans le Bordelais où les conseils des vins ont une importance majeure dans l’économie et la notoriété et des vins de Bordeaux.